Bienvenue dans les pelouses sèches des vallées péri-angoumoisines, milieu d’apparence inhospitalière qui abrite un cortège faunistique et floristique d’une grande richesse.
Parmi ces espèces, certaines décollent à notre passage comme jaillissant des entrailles de la terre pour s’accrocher au ciel. Peine perdue, la nature ne leur a pas donné des ailes pour tutoyer les nuages, sinon pour voler près du sol.. quand ils le peuvent.
Vous avez dit… orthoptères ?
Qu’on se le dise, même affublés de grands pieds et montés sur échasses, les orthoptères ne sont pas des clowns. Alors qui sont-ils ? Pour sûr, vous en connaissez au moins un qui se cache probablement dans votre jardin. Un petit terrier creusé dans la pelouse, des stridulations estivales, le brin d’herbe pour le faire sortir de sa cachette… Le grillon fait effectivement parti des orthoptères, c’est-à-dire des insectes qui ont les ailes (du grec ancien pteron) droites (pour orthós). L’ordre des orthoptères ne comprend pas que les grillons mais plus généralement tous les insectes coureurs, marcheurs ou sauteurs qui ont les ailes droites, parallèles au corps. Soit près de 22000 espèces sur la planète dont 205 recensés en France. Les sauterelles, criquets et autres courtilières font également partie des orthoptères, même si l’évolution a réduit à l'état de moignons les ailes de plusieurs sauterelles et criquets.
Le Criquet pansu est l'un des criquets les plus régulièrement observés en Charente (Photo David Neau)
Des insectes mal connus
Chez les orthoptères, on passe du simple au triple et même plus… d’un petit criquet appelé tétrix dont l'adulte mesure un centimètre jusqu’au quatre centimètres de la Grande sauterelle verte. Si cette dernière est bien connue parce que visible et loquace, d’autres sont plus discrètes, de par leur taille ou leur comportement. Certaines sauterelles sont même exclusivement nocturnes. Cette discrétion, combinée aux menaces qui pèsent sur ces insectes, particulièrement l’utilisation de produits phytosanitaires (rappelons que la France est le premier pays européen consommateur de pesticides !) et la destruction de leurs habitats, sont autant de contraintes qui ne nous permettent pas d’approfondir nos connaissances de terrain, d’estimer leur répartition régionale et de connaître leur degré de rareté.
Il était temps de remédier à ce flou entomologique.
Le Conocéphale des roseaux est une espèce typique des zones humides et menacée
par les destruction de ses habitats (Photo David Neau)
La solution, un atlas
Ainsi naquit en 2012 le projet de création d’un atlas régional des criquets, sauterelles, grillons et courtilières, porté par Poitou-Charentes Nature et coordonné en région par Nature-Environnement 17 (Olivier Roques), avec le soutien financier de la Région Poitou-Charentes, de la DREAL, du FEADER et de l’Union Européenne. Un travail de longue haleine qui porte sur des prospections de terrain et de formations en salle jusqu’en 2017, année théorique de l’édition de l'atlas.
A l’instar de l’atlas des papillons de jour, c’est un recueil de données qui va permettre d’étudier la véritable répartition des espèces picto-charentaises, de comprendre leurs exigences écologiques pour une meilleure conservation des populations.
Actions, formations, sensibilisation !
L'année 2012 a fait l’objet d’une formation interne entre salariés des associations coordinatrices, à savoir Vienne Nature, Charente Nature, Nature-Environnement 17 et Deux-Sèvres Nature Environnement. Depuis 2013, Charente Nature a proposé neuf sorties sur le terrain : en forêt de la Braconne, réservoir entomologique d’une grande richesse, dans les pelouses sèches de la Tourette (commune de La Couronne) ainsi qu’au Petit Fresquet et sur Sant-Germain de Confolens. Munie de filets et des clés de détermination, une dizaine de bénévoles a accompagné les chargés d’études de l'association à la découverte des insectes à longues pattes.
A l'aune de cet inventaire régional, la Charente comptait 56 espèces d'orthoptères. Depuis 2013, sept nouvelles espèces ont été découvertes comme le Tétrix des carrières, le Tétrix déprimé, le Phanéroptère liliacé et le Criquet des larris. Elles s’ajoutent à notre liste départementale qui compte désormais 64 espèces pour 77 espèces présentes en Poitou-Charentes, soit 83 % du cortège régional.